Jelgava, Lettonie

Printemps estival

Nos habits de pluie sont maintenant rangés bien au fond de nos sacoches. Depuis une vingtaine de jours, le soleil ne nous quitte plus. Les températures avoisinant les 23 degrés non plus. Les bas de nos pantalons détachables trônent fièrement à l’arrière de nos vélos en compagnie de nos jaquettes. Les fameuses marques de cycliste se dessinent sérieusement sur nos jambes, bras et chevilles. Plus étonnant, on distingue clairement la marque de la lanière du casque sur nos visages, surtout chez Van. Dan est passablement épargné grâce à sa barbe. Tout ceci n’est pas des plus glamour mais si c’est le prix à payer pour pédaler sous un soleil d’été en avril, ça nous va.

On entre aujourd’hui en Allemagne, notre 20ème pays après un peu plus de sept mois de voyage. La ville de Dresde y sera notre premier point de chute. Nous longeons l’Elbe jusqu’au centre de la ville où nous entrons directement par un magnifique parc. Notre hôte du jour, Alexander, est un passionné de nature et de photographie. Il affectionne tout particulièrement les voyages à vélo dans le nord de l’Europe, en Norvège surtout. Nous en profitons donc pour récupérer de précieux conseils pour la suite de notre périple autour d’un repas que nous préparons pour lui et sa compagne en guise de remerciement pour leur hospitalité.

Après de longues hésitations sur notre prochaine destination, nous décidons finalement de mettre le cap sur Berlin. Comme dirait notre pote Romain, on a mis un bon braquet et on a bien « avoiné » jusqu’à la capitale allemande. 230km en deux jours pour atterrir chez François, un Lausannois d’origine, qui nous accueille deux nuits dans son appartement immaculé du centre-ville. Bien pratique pour visiter le Mitte sous le soleil. Nous décidons de prolonger notre séjour à Berlin pour nous reposer un peu. Les visites c’est sympa mais malheureusement pas des plus reposant. Rien de mieux alors que de filer chez Nathanaël dans le quartier populaire de Neukölln pour y flâner deux jours durant. Autour d’un repas et de quelques verres de vin local, nous découvrons notre sympathique hôte qui nous raconte quelques contours de sa vie et notamment son voyage spirituel jusqu’au Portugal, passionnant.

Sous un ciel maussade et un peu menaçant, nous reprenons la route en direction de la campagne allemande pour se rendre chez Ralf, à quelques kilomètres de la frontière polonaise. Il vit dans une vieille ferme qu’il a achetée avec son meilleur ami. Un lieu où l’on vit en toute simplicité et qui cache un potentiel incroyable. Ralf, qui maîtrise parfaitement le français grâce ses conquêtes féminines, nous fait faire le tour du propriétaire et nous parle les yeux remplis d’étoiles de ses projets de rénovation. Une montagne de travail impressionnante mais qui ne nous paraît pas insensée dans les mains d’un tel autodidacte. On ne peut s’empêcher de l’envier en quittant son petit paradis le lendemain pour rejoindre la Pologne.

La découverte d’un nouveau pays rime souvent avec la découverte de nouvelles infrastructures. Nous passons donc notre première journée polonaise sur des routes en piteux état et très fréquentées. C’est au bout du rouleau que nous arrivons chez Agnieszka et sa famille où on y déguste les fameux « pierogi », la spécialité locale. La compagnie de leurs deux enfants âgés de 4 et 6 ans nous rappelle que nos proches nous manquent et particulièrement les neveux et filleuls de Dan. La rencontre avec Agnieszka est aussi l’occasion pour nous d’en apprendre plus sur ces incroyables nids de cigognes que nous avons croisé en nombre sur notre route. Elle nous apprend que lorsqu’un habitant voit un de ces volatile essayer de faire son nid sur un poteau électrique, il peut contacter une compagnie qui vient alors installer une plate-forme sur ledit poteau afin de faciliter l’installation du nid. Nous on trouve ça magique. Notre deuxième journée de route ne se révèle pas plus convaincante que la première malgré les quelques conseils que nos hôtes nous ont prodigués la veille. C’est une des premières fois depuis le début du voyage où l’on songe sérieusement à prendre le train pour s’éloigner de ces routes à l’état déplorable et bien trop chargées en camions et chauffards. Heureusement, notre hôte du jour, Piter, nous attend à l’arrivée de notre étape pour nous emmener dans sa maison au coeur d’une des nombreuse forêt polonaise. Un endroit magnifique où nous sommes traités comme des rois. Nous en apprenons plus sur la Pologne et sa culture au cours de non pas un mais deux soupers partagés avec Piter, sa femme et son fils. Pour la petite histoire, lorsque nous sommes arrivés chez Piter aux alentours de 17h30, nous sommes immédiatement passés à table. C’est ensuite repus que nous sommes allés prendre une douche et nous reposer un peu avant de rejoindre la famille pour discuter. C’est à ce moment-là, qu’à notre plus grande surprise nous avons découvert que la table était mise pour le deuxième souper. A ce jour nous n’avons toujours pas compris mais on en rit encore. Nous reprenons la route le lendemain avec de nouveaux conseils routiers en poche ainsi que le pique-nique du midi soigneusement préparé par la femme de Piter.

Les jours suivants sont bien plus agréables à rouler. Les routes ne sont certes pas en très bon état mais on parvient cependant à éviter le gros du trafic. Il est ainsi plus évident de zigzaguer entre les trous sans risque de passer sous un camion. Au détour d’une conversation, Piter nous avait fait part de l’infime probabilité de tomber sur un troupeau de bisons européens, une meute de loups ou de sangliers au coeur des immenses forêts que nous traversons. C’est pourquoi nous sommes bien contents de camper dans la cour d’école d’un tout petit village puis, la nuit suivante, dans un magnifique camping au bord d’un petit lac. Il s’agit sans doute du plus joli camping où nous avons posé notre tente depuis le début du voyage. Un camping qui se mérite toutefois après une piste de sable d’une dizaine de kilomètres où il était parfois impossible de rouler. Nous nous reposons ensuite un jour à Gdansk, lieu clé du déclenchement de la Seconde Guerre mondiale. Après notre traditionnelle balade dans la vielle ville quasiment entièrement détruite pendant l’affrontement puis reconstruite, nous visitons durant plus de 3 heures un magnifique musée dédié à la Deuxième Guerre mondiale. Puis, nous rejoignons la ville d’Elbag où nous emprunterons le « GreenVelo », la plus grande piste cyclable européenne, jusqu’aux portes de la Lituanie. C’est ainsi que nous traversons la magnifique région des mille lacs et faisons notamment escale chez Stanislaw, ancien militaire devenu apiculteur et voyageur à vélo solitaire durant ses vacances annuelles.

Depuis notre départ de Berlin, le dénivelé journalier est proche de zéro et à en croire les locaux, ce n’est pas dans les pays baltiques que cela va changer. Nos premiers kilomètres en Lituanie confirment cette tendance. Ici, le casque n’est pas obligatoire contrairement au chasuble de luciole. Notre première journée nous amène chez Tadas et sa famille qui nous offrent le meilleur accueil possible dans notre 22ème pays. Ils vivent avec leur centaine de vaches dans une magnifique ferme laitière essentiellement construite par leurs soins il y a plus de 20 ans. On y déguste leurs propres lait, fromages et beurres fraichement produits, un vrai régal. C’est avec la bonne odeur de nos habits tout propres que nous nous rendons chez Juste et sa famille dans leur maison traditionnelle située au sein d’un petit village. Nous posons notre tente dans leur jardin pour deux nuits. Nous profitons de nous reposer tout en bavardant au soleil avec Juste en gardant un oeil sur sa petite fille âgée d’une quinzaine de mois. Elle nous fait découvrir le fameux sauna lituanien, véritable religion des pays baltiques et scandinaves. Ici, tout le monde a son sauna. Autant dire que si vous n’en avez pas, c’est vraiment la honte et personne ne veut venir passer la soirée chez vous. Et on ne vous parle pas d’un pauvre sauna électrique. Non, ceux-ci sont chauffés au feux de bois et on ne se contente pas de cuire comme des steaks sur une planche en bois. Peeling au gros sel, nettoyage à la poudre d’ambre, secouage de bouquets de branches d’arbre humides pour faire monter la température, et baignade dans la rivière sont au programme. Et vous avez meilleur temps de vous y tenir même si l’eau avoisine les 10 degrés et que le fond de celle-ci est, comment dire, spongieuse, gluante et d’après Dan, sujette à toutes sortes de bêtes.

C’est la peau toute douce que nous enfourchons nos montures en direction de la Lettonie. Malgré des routes souvent composées de piste et de gros pelleux, le trafic est relativement faible et il est plutôt agréable d’y rouler. Nous faisons halte au bord d’un lac où un emplacement pour les tentes y est prévu. Dan profite de lancer la saison de la baignade naturelle. Le jour suivant, après un passage à la fameuse colline des croix, lieu de pèlerinage un peu étrange, nous rejoignons le camping « Sunny Night » pour la nuit. Le soir venu on partage avec les autres voyageurs et membres du camping quelques verres de cidre fait à partir des pommiers situés sur le terrain. Nous découvrons qu’il s’agit bien plus que d’un simple camping mais d’un lieu d’échanges où il s’y déroule notamment un magnifique festival de musique en plein été. Nous entrons en Lettonie pour un dernier stop à Jelgava avant la visite de Jo, venu de spécialement de Suisse pour passer quelques jours en notre compagnie. On a vraiment hâte de retrouver un visage familier.

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